Globalement, l’offre de soins en santé mentale est très insuffisante au Burundi, comme dans beaucoup d’autres pays d’Afrique. Actuellement, les soins psychiatriques au Burundi se déroulent dans des asiles. Mais ces soins sont peu accessibles et ne permettent pas aux patients de construire un réel projet de vie soutenu par la communauté. Trop peu de personnes souffrant de troubles psychiatriques arrivent jusqu’aux services de santé et, bien souvent, ceux qui y arrivent le font trop tardivement. Ceci s’explique par différents facteurs. D’abord, il n’existe qu’un seul centre neuropsychiatrique de référence. Ensuite, les patients et leur famille ne connaissent pas la santé mentale, et, enfin, les habitudes d’emmener les personnes malades vers les centres de prières ou les tradipraticiens persistent.
Innocent Ntwari, Doyen de la faculté de psychologie et sciences de l'éducation
Selon Innocent Ntwari, Doyen de la faculté de psychologie et sciences de l'éducation, le projet vise au développement de la réhabilitation communautaire au profit des personnes malades mentales suivant un parcours psychiatrique au Burundi. Pour lui, plus de 60 % de la population présenterait un mal-être psychologique et 47 % serait lié à des troubles psychiatriques plus sévères.
Dr Renovate IRAMBONA
Dr Renovate IRAMBONA est coordinatrice du projet. Elle fait savoir que l'accessibilité aux soins psychiatriques est faible, que ce soit au niveau géographique, financier ou culturel. Elle indique que les soins se résument souvent à une prise en charge médicamenteuse avec très peu de préparation à la sortie. Elle précise que, sans soutien familial fort, la personne qui sort de l'hôpital se retrouve sans ressources, ne peut subvenir à ses besoins et n'a que très peu de perspectives d'avenir. Et de dire : « Le projet de recherche, porté par la section ergothérapie de la HELHa et la Faculté de Psychologie et des sciences de l'éducation de l'Université du Burundi, en collaboration avec l’ISFSC et le Centre neuropsychiatrique de Kamenge à Bujumbura, et financé par l’ARES a pour objectif, en 3 ans, d'implémenter la réhabilitation communautaire/psychosociale ». Elle informe que par essence,les pathologies mentales coupent / éloignent la personne de son fonctionnement normal en communauté. Elle trouve aussi que l'environnement est rarement adapté à la réintégration des personnes suivant un parcours psychiatrique dans leur communauté, après hospitalisation dans différents centres de soins mentaux.
Elle regrette que la réhabilitation soit précisée comme axe d'intervention dans les directives nationales du Burundi mais n'a pas encore pu être mise en place par le Ministère de la Santé publique et de lutte contre le sida depuis 2019. D’après elle, le projet est pensé en trois phases : l’analyse du contexte et définition du modèle, la formation des intervenants dans le parcours de réhabilitation et l’implémentation du modèle. Elle précise: « Nous en sommes à la deuxième phase ».
Des résultats attendus du projet
Selon Dr Renovate IRAMBONA, parmi les résultats escomptés est que les personnes souffrant de maladie mentale participent activement à leur processus de réhabilitation dans la communauté. Il s’agit également d’un parcours de suivi pluridisciplinaire de réhabilitation communautaire des patients psychiatriques burundais. Les prestataires de soins (originaires de plusieurs niveaux de soins) sont formés qualitativement pour accompagner la réhabilitation de la personne avec un parcours psychiatrique. Les prestataires de soins accompagnent les patients et les familles dans leur processus de réhabilitation communautaire.
Des défis liés à la santé mentale
Monsieur Pierre-Claver NJEJIMANA, cadre du CNPK explique que la situation actuelle de la santé mentale au Burundi est autre. Parmi les défis de la santé mentale au Burundi, il reconnait l’absence de programme propre à la santé mentale, l’ignorance de la maladie mentale par la communauté, l’existence d’un petit service de santé mentale dans le programme des maladies chroniques non transmissibles. A cela s’ajoutent selon lui, que beaucoup des malades psychiatriques n’ont pas accès aux soins, plusieurs patients trimbalent dans les rues sans aucune assistance ainsi que l’absence de la législation en matière de la santé mentale.
Mme Cécile LEROY
Mme Cécile LEROY fait savoir que la réhabilitation psychosociale est une approche recommandée en santé mentale car dit-elle, elle permet à la personne suivant un parcours psychiatrique de retrouver une place dans la société. Pour elle, les résultats sont atténués grâce à des actions pour et avec la personne sur le recouvrement des aptitudes, l'optimisation du réseau social et la définition des rôles sociaux. Pour elle, la santé mentale n'est pas l'affaire que des professionnels de la psychiatrie ... il faut une implication de tous.
La réhabilitation psychosociale renvoie à un ensemble de procédés visant à aider les personnes souffrant de troubles psychiques à se rétablir, c’est-à-dire à obtenir un niveau de vie et d’adaptation satisfaisant par rapport à leurs attentes