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Lorsque Kibira était élevé au statut d’aire protégée par une ordonnance ministérielle établissant ses limites le 12 décembre 1933, sa superficie était de 90 000 hectares. Tel était toujours le cas jusqu’en 1950, selon Pr. Richard Habonayo, enseignant chercheur à la faculté d’Agronomie et de Bio-ingénierie à l’université du Burundi. Aujourd’hui, cet espace s’effrite suite aux blocs agro-industriels de thé, aux cultures vivrières, aux constructions d’une centrale hydroélectrique et à l’exploitation illégale des ressources forestières et minières. Ces actions humaines sont à l’origine de la diminution et de la migration des animaux sauvages. La déforestation de Kibira et la sécheresse accélèrent l’asséchement des ressources en eau. La population, dans les deux bassins versants du parc en paye les frais. Les environnementalistes et écologiques tirent la sonnette d’alarme dans cette enquête réalisée par Arthur Bizimana avec le soutien de Pulitzer Center.
Thé vs arbres : la lutte du parc national de Kibira 

« Tu vois de l‘autre côté ce secteur de plantation de thé ? », montre du doigt le secteur B du complexe théicole de Rwegura, Etienne Nsaguye, 62 ans, habitant de la localité Rwagongwe situé près du parc. « Nous, nous appelons aujourd’hui ce secteur ‘’muri gitansiyo’’ », une adaptation du mot ‘’extension’’ en kirundi.  

Autrefois, cette zone était occupée par une forêt dense. Elle faisait partie du parc national de la Kibira, précise Nsaguye.  On y rencontrait les chimpanzés, les gorilles, les phacochères, etc. comme on rencontre aujourd’hui un troupeau de chèvres dans la rue depuis la rivière Gitenge jusqu’à ce qu’on traverse la Kibira, soit une longueur d’environ dix kilomètres,  se souvient Etienne Nsaguye.
 
« Mais, maintenant, tu vois, cette zone de forêt a laissé la place aux plantations de thé. »poursuit-il. Et les animaux ont presque disparu. « On peut traverser le secteur Rwegura du parc national de Kibira sans rencontrer un seul chimpanzé.  On ne voit que les singes. »Indique-t-il 

 Secteur B du bloc agro-industriel de thé de Rwegura installé dans l’ancienne zone de Kibira et géré par l’OTB, autrement appelé ‘’muri gitansiyo’’ , une adaptation du mot ‘’extension’’ en kirundi.
Rwegura est l’un des trois blocs agro-industriels de thé géré par l’Office du thé du Burundi (OTB) et installés dans l’ancienne zone de la forêt de la Kibira. Ce dernier s’étend au Nord-Ouest du pays sur une longueur de plus ou moins 8Okm. Il est subdivisé en quatre secteurs à savoir: le secteur Musigati de la commune Bubanza, le secteur Teza de la commune Muramvya, le secteur Rwegura de la commune Kayanza et le secteur Mabayi de la commune Mabayi. 
Les trois blocs agro-industriels de thé sont alors implantés les secteurs Rwegura, Buhoro à Mabayi et Teza. Actuellement, ces blocs agro-industriels sont contigus avec le parc et pénètrent à l’intérieur de la Kibira. Ainsi, les limites du parc et des blocs agro-industriels de thé restent floues.
  
A quand l’implantation du thé au Burundi ?

C’est dans le secteur Teza du parc de Kibira, à trente (30) kilomètres au nord-est de Bujumbura—capitale économique du Burundi—soit 48 kilomètres par la route, où sera introduite la culture du thé au lendemain de l’indépendance en 1963 par le gouvernement du Burundi à travers l’OTB avec l’intention d’élever le niveau de vie de sa population et de diversifier ses exportations.  

Son extension progressive jusqu’en 1970 amputera à la Kibira une superficie d’environ 1000 hectares.  

L’OTB ne s’arrêtera pas là. Il implantera progressivement deux blocs agro-industriels de thé dans deux autres secteurs du PNK, à savoir Rwegura et Buhoro. En même temps, il développe la culture théicole dans les milieux villageois environnants et lointains.   

Au fur et à mesure que l’espace cultivable du thé augmente, non seulement la superficie de la Kibira se réduit, mais aussi elle s’éclaircit au bord de ces blocs industriels. Sa biomasse végétale diminue. 

« Lors de son élévation au statut d’aire protégée par une ordonnance ministérielle établissant les limites de la Kibira le 12 décembre 1933, sa superficie était estimée à 90 000 hectares. Tel était toujours le cas jusqu’en 1950 »,  selon Pr. Richard Habonayo, enseignant-chercheur à la faculté d’Agronomie et de Bio-ingénierie à l’université du Burundi. 

Néanmoins, à la création de l’Institut national pour l'Environnement et la Conservation de la nature (INECN) en 1982, la superficie de la Kibira était déjà tombée à 40 000 hectares, soit une perte de plus de la moitié de la superficie de l‘aire protégée qui équivaut à 125% de pertes, selon le rapport de la troisième Communication nationale sur les changements climatiques.

Officiellement, la superficie de la Kibira est aussi estimée aujourd’hui à 40 000 hectares.  

Une étude, menée par les chercheurs Dr. Joël Ndayishimiye et Pr. Fréderic Bangirinama en 2016 citée par Pr. Habonayo montre, à travers les images, plutôt que la superficie de la Kibira continue à diminuer et s’élève à plus de 36 000 hectares.

En octobre 2019, la troisième Communication nationale sur les changements climatiques estimait la perte de la superficie de la Kibira ces dix dernières années (de 2009 à 2019) à entre 10 000 et 12 000 hectares. Actuellement, soit six ans après sa publication, la superficie de la Kibira n’est pas bien connue, lit-on dans le même rapport.  

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